mercredi 13 février 2008

Histoire de Natashquan (3) : Modernité et communication

Ne disposant pas de mes fichiers de photos aujourd'hui, cet article sera illustré lors de ma prochaine connexion sur le blog. Veuillez m'en excuser.

Natashquan, malgré son isolement, vit maintenant comme n’importe quel autre village du Québec. Certes, la marchandise met du temps à arriver, les journaux ne sont jamais ceux du jour, Internet n’existe qu’à bas débit, il n’y a pas de réseau pour téléphones cellulaires, etc. Mais il ne s’agit que de broutilles par rapport à ce que connaissaient les habitants du village il y a encore quelques années.

Imaginez qu’il a fallu attendre 1958 pour voir arriver l’électricité à Natashquan. Il ne s’agit au départ que d’une petite usine de la coopérative locale, qui passe aux mains du réseau provincial en 1964. La génératrice locale et son bruyant moteur diesel continueront de fonctionner jusqu’en 1980.

Le télégraphe arrive en 1895, lorsqu’on prolonge la ligne jusqu’à Natashquan. Cette ligne sert principalement à la navigation sur le golfe du Saint-Laurent. Le téléphone débarque vers 1918 et relie d’abord le club de pêche au saumon et Pointe-Parent, avant de joindre le presbytère et le bureau de télégraphe de Natashquan. Progressivement, tout le village se relie à cette unique ligne. Le nombre de sonneries permettent d’identifier le propriétaire du téléphone (exemple : trois longs deux courts). Tout le monde pouvait donc écouter les conversations que les villageois avaient avec l’extérieur ! Le service télégraphique disparaît en 1969 avec l’arrivée du téléphone interurbain.

Le cinéma apparaît au village sous l’impulsion du curé Arthur Parent en 1953. Fonctionnant grâce à des génératrices à essence, le projecteur diffuse films bibliques et westerns à l’école où dans le sous-sol du couvent. La télévision quant à elle fait une apparition remarquée en … 1975 !

Pour ce qui est du transport des hommes, des marchandises et surtout du courrier, Natashquan pouvait compter au début du 20e siècle sur les progrès de la navigation à vapeur. Mais l’hiver venu, l’unique moyen de transport disponible s’appelait « cométique », l’ancestral traîneau à chiens inuit, qui reste très longtemps la seule alternative possible pour circuler sur l’immense pays de la Côte-Nord. C’est ainsi qu’un postillon appelé « cométique » était chargé de desservir un territoire s’étalant de Tadoussac à Blanc-Sablon, et cela une fois par mois ! Cette tâche, difficilement imaginable de nos jours, fut longtemps assumée par un certain Jos Hébert, rendu célèbre par Gilles Vigneault.

« Qui c’que c’est qui s’en va
Porter des lettres d’amour
Des gars de Havre-Saint-Pierre
Aux filles de Blanc-Sablon
Sur les chemins verglacés
C’est Jos c’est Jos Hébert. »

C’est en septembre 1922 que le premier aéroplane survole Natashquan. Des compagnies aériennes vont bientôt se succéder pour le transport du courrier. Le service postal est alors pour le moins rudimentaire : les sacs sont largués en plein vol dans une zone désignée. Ce qui ne se fait généralement pas sans casse. Le transport des passagers se développe quant à lui au cours des années cinquante et la première vraie piste d’atterrissage est construite en 1955.

La semaine prochaine, je vous parle de la vie avant et après la construction de la route 138.

Sources :
- FRENETTE (Pierre) & LANDRY (Bernard), Natashquan… Le goût du large, Montréal, Les Nouvelles Éditions de l’Arc, 2005.
- Sur la route de Natashquan, audio guide routier, Natashquan, 2005.

dimanche 10 février 2008

Histoire de Natashquan (2) : Développement du village (1900-1940)

L’année 1903 marque l’arrivée de France à Natashquan des frères Eudistes. Ces prêtres, très actifs, vont moderniser l’organisation du village et être à l’origine de la création de la première municipalité civile (1907). Le pont sur la rivière Natashquan, reliant enfin les deux parties du villages, sera achevé et béni en 1912. Il en sera de même pour le quai, construit sur l’initiative du député libéral Joseph Girard. Deux phares, un petit et un grand, sont également construits au tournant du 20e siècle.


Charles Robin, Archives nationales du Canada

Les années trente vont marquer le déclin de la pêche à la morue. Avec le développement des nouveaux bateaux à vapeur, le poisson frais et congelé va avoir le dessus sur le bon vieux poisson séché et salé de Natashquan. L’entreprise des frères De la Parelle, devenue la « Robin », ferme ses portes en 1935. La pêche à la morue continuera, mais c’est la fin d’une époque pour le village.

Pointe-Parent

Parallèlement à l’installation des Madelinots à Natashquan se développe le village du Poste, où se déroulent l’achat de fourrures et le partage de la pêche au saumon avec les chasseurs autochtones qui reviennent sur la côte au cours de l’été. Le gouvernement du Canada-Uni va prendre le contrôle du poste en 1859 pour en faire un club de pêche pour riches sportifs britanniques et américains. Le village, composé de moins d’une dizaine de familles va donc se développer à l’ouest de Natashquan et côtoyer les familles autochtones ayant de plus en plus de mal à subsister de leur pêche et ayant tendance à se sédentariser.

Nutashkuan : sédentarisation progressive des Montagnais

Avant la moitié du 19e siècle, les Innus, appelés aussi Montagnais, sont les seuls habitants d’un territoire gigantesque s’étirant jusqu’à 600 kilomètres à l’intérieur des terres, le long de la Côte Nord. Ils vivent au départ de chasse, de pêche et cueillette. Avec l’installation des premiers comptoirs de traite au 18e siècle, ils vont se spécialiser dans le piégeage et la trappe. L’expansion des villages blancs au 20e siècle, l’arrivée progressive d’industries minières et forestière, la construction de barrages hydro-électriques, etc. vont profondément modifier leur mode de vie et accélérer leur installation dans de nouveaux villages fixes, comme Nutashkuan, qui forme une des neuf communautés innues du Québec.

La réserve de Nutashkuan est collée au village de Pointe-Parent. Elle est "créée" en 1953 par le gouvernement fédéral et comprend au départ une quinzaine de maisons entourant une petite chapelle. Les Montagnais ne cesseront de l'agrandir au fil du siècle.

[À suivre]


L’histoire des Innus au vingtième siècle, depuis leur sédentarisation jusqu’à aujourd’hui, demanderait que j’y consacre un vaste article dont je ne cesse de repousser la rédaction. Faute de mieux pour l'instant, je vous proposerai un article en forme de fiche d’identité de la nation Innue, la deuxième plus populeuse du Québec. Ce sera pour la semaine prochaine, à la suite d’un autre article, consacré lui à l’évolution des moyens de communication à Natashquan.

Sources :
- FRENETTE (Pierre) & LANDRY (Bernard), Natashquan… Le goût du large, Montréal, Les Nouvelles Éditions de l’Arc, 2005.
- Mythes et réalités sur les peuples autochtones, Pierre Lepage [sous dir.], Montréal, Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, 2002.
- FRENETTE (Pierre), Histoire de la Côte-Nord, Coll. «Les Régions du Québec», Québec, IQRC, 1996.

mardi 5 février 2008

Reprise


La tempête est passée, elle a fait des dégâts, mais la vie continue.

Je ne crois pas qu’il soit très pertinent de revenir ici sur les évènements qui ont eu lieu la semaine dernière. Je tiens tout de même à remercier les gens de Natashquan qui ont pris le temps de lire mon blog avant de me juger, et toutes celles et ceux qui m’ont encouragé à rester au village et à continuer de décrire mes découvertes. Un grand merci également aux nombreux internautes qui m’ont écrit ou ont laissé des commentaires. Votre soutien m’a été très utile et m’a permis, dans la confusion, de comprendre que je ne faisais pas fausse route avec ce blog.

Si vous le permettez, cet espace va donc reprendre ses modestes activités avec la publication, dans les prochains jours, de la suite de mes petits articles consacrés à l'histoire du village.

À très bientôt donc, dans la joie, la bonne humeur et l'incroyable lumière de ce bout du monde,

Guillaume.